Projet de loi de finances 2025 : Ce que cache vraiment la réforme pour les propriétaires
Le projet de loi de finances 2025 transforme la fiscalité française : fin des avantages sur les locations meublées et nouvelle taxation des hauts revenus.
Alexia JacquardPublié le Mis à jour leLe nouveau projet de loi de finances 2025 prévoit un changement radical pour les propriétaires de locations meublées. Dans la version validée par la Commission Mixte Paritaire, l'article 24 réintègre les amortissements dans le calcul des plus-values à la revente, une mesure qui pourrait coûter des dizaines de milliers d'euros aux investisseurs. Cette réforme, qui devrait être adoptée par 49.3, s'accompagne d'autres bouleversements majeurs : une nouvelle taxation des hauts revenus, un durcissement du contrôle des cryptomonnaies et une contribution exceptionnelle pour les grandes entreprises. Un séisme fiscal qui va transformer durablement le paysage de l'investissement en France.
Résumé :
La rentabilité des investissements LMNP remise en cause
Les cryptos échappent à l'impôt sur la fortune improductive
Une nouvelle contribution fiscale cible les hauts patrimoines
L'application rétroactive inquiète le marché
Le verdict est tombé ce vendredi 31 janvier après 14 heures de délibérations à huis clos. La Commission Mixte Paritaire a validé une version du Projet de Loi Finances 2025 qui transforme radicalement le paysage fiscal français. François Bayrou, fraîchement nommé Premier ministre, n'a pas tardé à utiliser l'article 49.3 pour faire passer le texte sans vote, une décision qui cristallise les tensions politiques et soulève l'inquiétude des investisseurs.
La réforme du statut LMNP, pierre angulaire de ce projet de loi, s'inscrit dans une volonté gouvernementale de réduire le déficit public en ciblant particulièrement l'investissement immobilier. Cette orientation politique intervient dans un contexte déjà tendu pour le marché immobilier, marqué par la hausse des taux d'intérêt et le ralentissement des transactions.
La bataille parlementaire s'engage autour du PLF 2025
Le calendrier parlementaire s'accélère avec l'examen du texte prévu ce lundi à l'Assemblée nationale, suivi jeudi par le Sénat. La configuration politique actuelle, marquée par l'absence de majorité absolue, pousse le gouvernement vers l'utilisation du 49.3, une procédure qui permettrait l'adoption du texte sans vote, sauf en cas de motion de censure adoptée.
Au sein de la Commission Mixte Paritaire, l'alliance entre les macronistes et Les Républicains, forte de huit sièges sur quatorze, a permis de verrouiller le texte. Les socialistes, malgré l'obtention de concessions comme le maintien des crédits de l'Aide Médicale d'État et la préservation des postes d'enseignants, réaffirment leur opposition. Le Rassemblement National, quant à lui, critique les décisions prises sur le nucléaire et les prix de l'électricité, laissant planer la menace d'une motion de censure.
Le texte officiel du PLF 2025, consultable sur le site de l'Assemblée nationale, révèle l'ampleur des transformations fiscales à venir. Ces changements toucheront l'ensemble des acteurs économiques, des particuliers aux grandes entreprises, avec une application prévue dès janvier 2025 pour la plupart des mesures.
L'amortissement LMNP : victime collatérale du PLF 2025
L'article 24 du PLF, validé par la CMP, porte un coup fatal au statut de Loueur Meublé Non Professionnel (LMNP). La modification majeure concerne la réintégration des amortissements lors du calcul des plus-values à la revente. Jusqu'à présent, ce mécanisme fiscal permettait aux propriétaires de déduire le remboursement de leur bien pour réduire leur imposition sur les loyers, sans impact sur la plus-value lors de la revente. Cette double optimisation fiscale constituait l'un des derniers avantages significatifs de l'investissement locatif en meublé.
En pratique, les conséquences seront lourdes pour les investisseurs. Prenons l'exemple d'un bien acheté 200 000 euros : si le propriétaire a déduit 50 000 euros d'amortissements sur plusieurs années, ce montant sera réintégré dans le calcul de la plus-value lors de la revente. Pour une vente à 300 000 euros, la plus-value imposable ne sera plus de 100 000 euros mais de 150 000 euros, augmentant significativement la charge fiscale finale. Cette modification touchera l'ensemble des détenteurs de LMNP au régime réel ayant pratiqué des amortissements.
Certaines exceptions subsistent néanmoins. Les locations nues, naturellement exclues du dispositif d'amortissement, ne sont pas concernées. Les SCI soumises à l'IS gardent leurs règles particulières de calcul des plus-values. Enfin, certaines résidences spécifiques bénéficient d'une exonération, dont les contours précis seront définis dans le texte final. Cette mesure rétroactive risque de figer davantage un marché immobilier déjà peu dynamique, les propriétaires étant incités à conserver leurs biens plus longtemps pour bénéficier des abattements pour durée de détention.
La double réforme qui cible patrimoine et cryptoactifs
Dans un retournement inattendu, l'article 3 octies prévoyant un impôt sur la fortune improductive a été supprimé du texte final. Cette décision offre un répit temporaire aux détenteurs de cryptomonnaies, qui échappent ainsi à une taxation sur leurs plus-values latentes. Cependant, le régime de surveillance se durcit considérablement : les plateformes d'échange (PSAN) devront déclarer à l'administration fiscale toutes les transactions de leurs utilisateurs, y compris les échanges crypto-crypto et les transferts vers des wallets personnels. Les sanctions prévues sont dissuasives : 15 euros par transaction non déclarée, avec un plafond de 2 millions d'euros par an et par plateforme.
La nouvelle "contribution différentielle" cible précisément les hauts revenus, avec des seuils fixés à 250 000 euros pour une personne seule et 500 000 euros pour un couple. Le mécanisme est redoutable : l'État recalculera l'impôt en appliquant un taux minimal de 20% sur les revenus, avant de comparer ce montant avec l'impôt initialement dû. Si l'écart est positif, le contribuable devra payer la différence. Un système d'atténuation est prévu pour les salaires compris entre 330 000 et 660 000 euros, mais cette mesure, touchant environ 70 000 foyers, limite drastiquement l'efficacité des niches fiscales traditionnelles.
Budget 2025 : cette nouvelle taxe sur les cryptomonnaies qui va transformer l'investissement en France | Le média de l'investisseur
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Une surtaxation temporaire aux lourdes conséquences
Le texte introduit une nouvelle "contribution exceptionnelle" visant les grandes entreprises, avec une application différenciée selon leur taille. Les sociétés réalisant entre 1 et 3 milliards d'euros de chiffre d'affaires en France subiront une taxation supplémentaire de 20,6% la première année, réduite à 10,3% la seconde. Pour les compagnies dépassant 3 milliards d'euros de CA, ces taux grimpent respectivement à 41,2% et 20,6%.
Cette mesure présente plusieurs caractéristiques particulièrement contraignantes : les crédits d'impôt ne peuvent pas être utilisés pour la réduire, elle n'est pas déductible fiscalement, et un paiement anticipé de 50% est exigé. Bien que présentée comme temporaire, son impact sur la compétitivité des entreprises françaises inquiète les analystes économiques. Les grands groupes devront verser ces contributions dès la clôture de l'exercice 2024, sans possibilité d'optimisation fiscale.
Le Projet de Loi de Finances 2025 marque un virage sans précédent dans la stratégie fiscale française. La fin programmée des avantages liés au statut LMNP, mesure phare de ce texte, s'avère particulièrement dévastatrice pour les investisseurs immobiliers qui devront impérativement recalculer la rentabilité de leurs investissements. L'application rétroactive de cette disposition, dès janvier 2025, ne laisse aucune marge de manœuvre aux propriétaires pour adapter leurs stratégies.
Si la suppression de l'impôt sur la fortune improductive apporte un soulagement provisoire aux détenteurs de cryptomonnaies, le renforcement drastique du contrôle des transactions annonce une nouvelle ère de surveillance accrue. Les grandes entreprises et les hauts revenus n'échappent pas à l'effort fiscal, avec des mesures qui, bien que présentées comme temporaires, risquent de s'inscrire pour de bon dans le paysage fiscal français.
L'adoption imminente du texte par 49.3 laisse peu d'espoir de modifications substantielles. Les investisseurs devront rapidement s'adapter à ce nouveau cadre fiscal qui redessine profondément les stratégies d'investissement en France. La rétroactivité de certaines mesures et l'absence de période transitoire témoignent d'une volonté gouvernementale de rendement fiscal immédiat, au risque de fragiliser durablement l'attractivité du marché français.